Marafa

Marafa
Le prisonnier légendaire du SED.

vendredi 28 septembre 2012

Le pourvoi en cassation est il possible en 48h?



Le pourvoi en cassation est il possible en 48h?
Il est environ 12h à Yaoundé. Précisément au palais de justice Yaoundé-centre administratif. Le coin grouille de monde. Chacun, presque sans s’occuper de l’autre, vaque à ses occupations, le pas pressé. Dans les salles, notamment celle ayant connu la condamnation de Marafa Hamidou Yaya, Yves Michel Fotso et autres se déroulent des audiences. Celle sus évoquée semble relever du passé. On est passé à autre chose. D’autres avenirs s’y jouent sous le regard avide du public, pas aussi nombreux qu’au procès Etat du Cameroun et ministère public contre Marafa et compagnie. Même le dispositif sécuritaire observé est retombé. Tout semble être revenu à la normale. 
C’est à quelques mètres de cette salle que Me Alice Nkom, avocat au barreau du Cameroun et conseil de Julienne Nkounda, ex-Dga de la Cbc, également poursuivie dans cette affaire, a pris ses quartiers. Patiemment, du moins en apparence, elle attend les déclarations d’appel et de pourvoi en cassation déposés il y a une dizaine de minutes au greffe « par souci de sécurité », explique l’avocate. C’est l’objet de sa présence en ces lieux parce que : « je suis venue pour faire appel et pourvoi en cassation parce que pour moi il y a un chevauchement. Je ne vois pas pourquoi une décision qui est rendue par le tribunal de grande instance, n’est pas régit par les dispositions qui sont contenues dans le Code de procédure pénale en vigueur ». 
Interrompue à chaque fois, soit par le crépitement de son téléphone, soit par des connaissances, pour la plupart, ses pairs. Beaucoup lui témoignent leur soutien et veulent en savoir plus. Elle est tout aussi sollicitée par les journalistes. Lesquels le plus souvent demandent des nouvelles par téléphone. Surtout que cette dernière a annoncé en guise de dernière plaidoirie un peu avant le prononcé du verdict, juste après le délibéré, qu’elle interjetterait appel. Ses réponses parfois en direct pour les radios, font penser qu’elle éclaire l’opinion sur l’attitude des accusés après leur condamnation par le tribunal de grande instance… Lesquels ont tous interjeté appel. « D’après ce que le juge nous a dit, nous n’avons plus la possibilité de faire appel parce que il y a un nouveau texte qui a créé un tribunal criminel spécial avec des règles spéciales et dérogatoires du Code de procédure pénal et qui dit qu’aujourd’hui, on ne peut plus faire appel ». Par conséquent, poursuit-elle : « Il faut aller essayer de démontrer au niveau de la Cour suprême que la loi n’a pas été bien appliquée. C’est le dernier jour ». Et la défense attend de la Cour suprême qu’elle « nous dise si les juges ont bien interprété et appliqué les lois. Celles dont nous avons soulevé les exceptions». Pour elle, ce procès était « un procès interdit par la loi. Il n’aurait jamais dû avoir lieu. Puisqu’il a déjà eu lieu en 2006 et que tout le monde a apprécié, le Cameroun en premier ». 

Nadège Christelle BOWA 

Me Alice Nkom: «C’était un procès interdit par la loi du Cameroun» 
Avocate au barreau du Cameroun, elle précise les stratégies de la défense maintenant que le verdict rendu par le tribunal de grande instance condamne les accusés. L’embarras des condamnés en question. 
Samedi dernier en guise de dernière plaidoirie, vous parliez d’interjeter appel dès ce jour. Rendu au jour indiqué, vous parlez aussi de pourvoi en cassation. Comment cela s’explique-t-il ? 

Le Code de procédure pénale prévoit que les décisions que le Tribunal de grande instance rend sont susceptibles d’appel. Or entre temps, on a créé un tribunal criminel spécial qui doit sanctionner les détournements des deniers publics, etc. Cette juridiction a commencé à récupérer les dossiers qui étaient en instance par exemple auprès du juge d’instruction. Mais, quand on a commencé cette procédure, le président du tribunal nous a dit « faites-vite parce que sinon on sera obligé d’envoyer le dossier au TCS ». Alors je me dis que n’ayant pas franchi le délai qui nous amenait devant le Tcs, nous sommes encore dans les règles du Code de procédure pénale et les règles qui s’appliquent au fonctionnement du tribunal de Grande instance qui nous a jugés. Donc, je me suis permis de faire appel parce que le Code de procédure pénale le permet. Mais, par souci de sécurité et d’intérêts de mes clients, j’ai également fait un pourvoi en cassation tout à l’heure au greffe au cas où ce sont les dispositions relatives au fonctionnement du tribunal criminel spécial qu’on appliquerait. 
On est donc arrivé au terme de cette procédure du moins devant le Tgi. Comment l’appréciez-vous ? 
Cette procédure était truffée de violations de la loi. Il a été question de tout sauf de suivre la loi… Madame, je voudrais qu’on me trouve quelqu’un qui peut détourner ce qu’il n’a pas eu… 
Parlez-vous précisément de votre client ? 
De tout le monde ! M. Fotso n’a jamais eu cet argent, il ne l’a jamais vu. La personne qui l’a eu c’est Gia International et qui le reconnaît. Et nous même avons été négociés auprès de la personne qui a obtenu. Je ne peux pas vous avoir donné de l’argent et accuser votre maman de l’avoir détourné […] C’est pourquoi l’article 184 dit qu’on punit celui qui a obtenu ou retenu frauduleusement, en plus, un bien appartenant à l’Etat ou à ses collectivités, ses démembrements. Celui qui a retenu, doit d’abord avoir obtenu. Or tout le monde a entendu le ministre des Finances dire qu’il a ordonné à la Snh de faire obtenir cet argent par Gia. La Snh a fait le virement en question et Gia en a accusé réception. L’Etat camerounais le sait puisque lorsqu’il a fallu négocier après avoir refusé l’avion que Boeing avait fabriqué pour cet argent qui n’était qu’un acompte, le président de la République a lui-même choisi quelqu’un pour aller récupérer cet argent auprès de celui justement à qui on a fait obtenir cet argent. C’est-à-dire celui qui l’a reçu. Et que le Cameroun se garde bien de poursuivre pour détournement de deniers publics. 
Pourquoi ? 
Parce qu’ils savent bien qu’ils ont arrangé cela là-bas et qu’il ne peut pas, sans se plonger dans le ridicule à l’international, faire ce qu’il fait ici en interne dans le secret de son pays qu’il commande et avec une justice qu’il commande et à qui il peut faire n’importe quoi. Ils ont poursuivi le directeur général français de la Cbc parce qu’il a ouvert un compte au nom d’une société d’Yves Michel Fotso. Ce Français n’est pas ici, ils auraient donc pu poursuivre aussi l’Américain qui a reçu de l’argent. Pourquoi ne l’ont-ils pas fait ? Parce qu’ils ne peuvent pas oser exporter ce ridicule-là. Or c’est là-bas aux Etats Unis que cette affaire s’est déroulée à 99,99%. 
Pourquoi dites vous que ce procès était interdit ? 
Je le redis, c’était un procès interdit par la loi du Cameroun et même par les principes universels généraux du droit que tout le monde applique à savoir que lorsqu’un litige a fait l’objet d’un arrangement, d’une convention librement accepté et signé par les parties, cette transaction, cette convention, cet accord est exactement assimilé à un jugement rendu en dernier ressort et définitif. Et il met un terme à tout litige relatif au même sujet. 
Et comment cela s’applique au procès qui vous concerne ? 
Lorsque le Cameroun a refusé de prendre l’avion qui avait été fabriqué et dans le dossier qui a été suivi par M. Fotso à la Camair et par M. Marafa, ils ont décidé d’aller chercher comment retrouver les fonds auprès de Gia à qui le Cameroun disait avoir donné ou viré cet argent. Le président de la République a désigné lui-même un avocat en la personne de Me Akere Muna, le bâtonnier. Ils lui ont donné tous les pouvoirs nécessaires en lui donnant comme instruction d’aller essayer de récupérer tout ou partie de cet argent qu’ils avaient viré à Gia. 
Me Muna et l’avocat qu’il avait constitué sur place ont réussi à trouver un accord qui permettait au Cameroun de repartir avec un avion, un 767- 200 et de l’argent. Et moyennant quoi, le Cameroun sous la plume Me Muna a signé un document qui dit que c’est terminé, on ne demande plus rien à personne, ni aux avocats de Camair, ni aux agents de l’Etat, ni à leur personnel… On a donné toute une liste, plus jamais on ne parlera de cette affaire. Et ce document a été validé par le tribunal local à Portland dans l’Etat de l’Oregon. C’est devenu un jugement définitif sur lequel on ne revient pas. Comme quand vous êtes mort, la loi interdit de vous poursuivre. 
Alors le procureur ici fait exactement comme si Ahidjo étant mort, et détenant même son acte de décès, on décide de le poursuivre quand même. Nous sommes dans la situation de l’article 62 du Code de procédure pénal qui dit qu’on ne poursuit pas dans ce cas-là. Donc, les poursuites même sont illégales. On n’aurait jamais dû commencer. Évidemment ayant commencé au mépris de la loi, ça ne pouvait que se terminer en violation de la loi. 
Pour vous c’est clair, vous avez fait appel doublé d’un pourvoi en cassation. Qu’en est-il des autres accusés ? 
Tout le monde fait appel contre le même jugement. J’ai fait appel pour tout le monde. Eux-aussi font appel, c’est pour tout le monde. Quand il y a une violation de la loi comme il y en a plein dans cette affaire-là, on va casser l’ensemble du jugement. Tous les avocats ont fait appel pour tous les condamnés. 
…Un rappel des violations subies ? 
Je vous ai parlé de l’article 62 […] Ce que le Cameroun a fait, c’est vraiment le signe d’un pays instable, sans éthique, qui ne sait pas ce qu’il veut, qui peut changer d’avis comme il l’a fait pour le choix de cet avion, jusqu’à ce que ça capote. Et ça c’est dangereux. 
Si je pose la question, c’est qu’il nous semble que vous connaissiez ces violations et que malgré tout, vous vous êtes engagée dans cette procédure. 
Mais, le président du tribunal ne recevait aucune exception avant. Il a dit pas question, il faut qu’on aille jusqu’au bout. 

Entretien avec 
Nadège Christelle BOWA

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