Marafa

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Le prisonnier légendaire du SED.

dimanche 9 décembre 2012

AFFAIRE FRANCK BIYA: C’EST CONFIRMÉ, FRANCK BIYA S’EST IRRÉGULIÈREMENT APPROPRIÉ DES MILLIARDS DE L’ARGENT PUBLIC !


Avec la complicité de Nkoto Emane, Dieudonné Evou Mekou, Louis-Paul Motaze et Polycarpe Abah Abah. Un hold-up de plusieurs milliards en 35 jours. Franck ne saura plus se mettre devant le regard de son président de père, grand jésus de la rigueur et de la moralisation et sultan de l’opération épervier dont il nous annonce qu’elle ira jusqu’au bout, quitte à ce que toute la République y passe.
L’opinion en était encore à supputer sur la culpabilité du fils du président et les avocats à innocenter maladroitement Franck Biya, la vérité a fini par transparaître de la masse de documents produits dans le cadre de l’affaire et dont certains, ironie du sort, étaient censés établir l’innocence de Franck mais l’ont plutôt enseveli.
L’histoire pourrait donner froid dans le dos. Calculette en main, Franck Biya aura mené une opération de «placement» qui lui aura rapporté 6 milliards 580 millions en seulement 35 jours.
Ses avocats et des journalistes visiblement à la solde tentent de noyer le poisson et argumentent que Franck Biya n’est pas le seul opérateur économique à avoir spéculé sur les titres Camtel. Okay. Mais il est certain que tous les autres investisseurs qui ont pris une option sur les titres
de Cameroon Télécommunica-tions n’auront jamais les mêmes faveurs que Franck Biya et que, contrairement à lui qui a bouclé la sienne en un mois, les autres devront attendre au moins cinq ans, le temps de la maturation de l’opération.
Autant on ne fait pas attendre un président de la République à l’entrée d’un stade, autant on ne fait pas poireauter son fils aux guichets d’une opération financière.
Au commencement étaient les titres remis à Yves-Michel Fotso
Un curieux document sorti du ministère des Finances et brandi fièrement par ses défenseurs comme preuve de son honnêteté, jette une nouvelle lumière sur le déroulement de cette scabreuse opération. En 2005, Camtel décide de titriser une partie de sa créance sur l’Etat. Les obligations du trésor à coupon zéro (les otz, comme on les appelle dans le jargon) sont émises pour 56,7 milliards, on se retrouve ainsi avec 56.745 titres sur le marché. 
Pas exactement sur le marché, parce que les titres en question circulent entre copains.
La preuve, la majeure partie de ces titres se retrouve entre les mains de la SFA (société financière africaine) ou de la CBC, les deux structures appartenant à Yves Michel Fotso.
La «note d’information» publiée par le Minfi (en réalité par la CAA) nous apprend que 35.400 titres Camtel ont été remis en nantissement à la CBC ou à la SFA, c’est-à-dire en garantie des crédits que la Camtel contractait auprès des banques de Fotso. De ces lots de titres remis à Fotso, il y a un lot de 9400 titres qui intéresse particulièrement Nkoto Emane, qui tient à les remettre à Afrione, la société de Franck Biya.
Les 9400 titres servaient à garantir un crédit à moyen terme d’un montant de 4,7 milliards dont la Camtel a bénéficié de la SFA. Qu’à cela ne tienne, et pour les besoins de la cause. Le 9 août 2006, Nkoto Emane écrit à la SFA et lui dit qu’il tient à rembourser par anticipation le crédit qu’il a contracté à ses guichets et qu’il souhaite que les 9 400 titres laissés en nantissement soient remis à Afrione. Le crédit en question est remboursé en deux temps, une première tranche de 1,014 milliard par chèque tiré sur Citibank, et le reste, un peu plus de 3,5 milliards, sera couvert par une lettre de garantie à première demande.
La lettre en question sera servie quelques jours plus tard par Afriland First Bank, dans laquelle officie comme directeur général un certain… Alamine Ousmane Mey.
Manoeuvres de sorcellerie financière
Assurée de rentrer en possession de son argent, la SFA libère les 9 400 titres qu’elle remet à Afrione. Et là apparaissent au grand jour les manoeuvres en sorcellerie financière qui ont ponctué de bout en bout l’opération des titres de la Camtel.
On constate que les titres émis par Nkoto Emane se négocient à 50 % de leur valeur faciale. Si 9400 titres valent 9,4 milliards, on les négocie à 4,7 milliards. Plutôt curieux pour une entreprise qui se dit ruinée et qui a besoin d’argent frais. La loi fait obligation à un émetteur de titres de valeurs mobilières de communiquer certaines informations fondamentales. Pour le cas des titres Camtel, ils sont émis pour une durée de cinq ans avec un taux d’intérêt de 3 %. Et c’est sur ce point que Franck Biya va se faire prendre.
Il prend officiellement possession des titres le 27 août 2006, mais n’attendra pas la maturité de cinq ans. Le 2 octobre 2006, soit 35 jours plus tard, le voilà qui cède par anticipation ses titres à la Caa. Dieudonné Evou Mekou, Dg de Caa les rachète, non pas à leur valeur transactionnelle d’il y a à peine plus d’un mois, mais à leur valeur faciale. En clair, les titres acquis 30 jours plus tôt pour 4,7 milliards valent le double, à savoir 9,4 milliards que la Caa va se mettre en devoir de racheter.
Pour bien brouiller les pistes, on fait mine de lui appliquer une décote de 30 % avec en plus, l’abandon des intérêts courus ou restant à courir. Franck Biya n’aura été détenteur de ces titres que pour une très courte période, les intérêts qu’il pouvait raisonnablement en attendre étaient insignifiants ou nuls. Une telle chance n’arrive à un homme que s’il s’appelle Franck Biya. Il est improbable et impossible que Yves Michel Fotso aurait pu bénéficier du même traitement de faveur absolue.
Franck Biya s’en sort donc avec un jackpot. Il a misé 4,7 milliards et il a gagné 6 milliards 580 millions. En seulement 35 jours. Quand on dit qu’il a misé 4,7 milliards pour acquérir les titres Camtel, l’affirmation est à prendre avec des pincettes et pourrait s’avérer inexacte. De tous les versements effectués à la SFA en remboursement du crédit contracté par la Camtel, il n’y a aucune trace de versements effectués par Franck Biya lui-même ni même par Afrione Cameroun.
Sinon, alors que les journaux sont envahis de facsimilés, on aurait au moins vu circuler un seul chèque d’Afrione ou de Franck Biya. Mais jusque-là, on fait l’impasse sur le détail. On en conclut que les autres, la Camtel de Nkoto Emane et Afriland First Bank de Alamine Ousmane Mey, ont payé pour lui. Il remboursera peut-être plus tard, mais ce sera une autre affaire. Pour l’instant, personne de ses défenseurs ne dit qu’il a empoché ses milliards sans bourse délier.
Les avocats du diable à Yaoundé, volant au secours du fils du président, des esprits bien pensants se sont commis avocats du diable. Ils multiplient sophismes et arguties pour expliquer l’inexplicable.
Pour les auteurs de la «version originale» partie du Minfi, «au regard de ce qui précède, l’on peut affirmer que la transaction relative au paiement anticipé des titres Camtel, acquis par Afrione, s’est déroulée conformément aux règles de l’art en la matière, à savoir, et à titre principal : abandon des intérêts échus ou à échoir et décote de la valeur faciale des titres…»
On est en face d’une première argutie juste propre à accroire le grand public et à mener les Camerounais en bateau. Aucune règle de l’art n’a prévalu dans cette opération. Les titres émis en 2006 seraient théoriquement arrivés à maturité en 2014, la date à laquelle Caa se serait trouvée dans l’obligation de payer la valeur faciale des titres et les intérêts sur cinq ans.
Il y a trois crimes majeurs dans l’opération Camtel.
D’abord, au moment d’émettre les titres, Nkoto Emane a choisi d’abandonner de facto la moitié de sa créance sur l’Etat. Les titres ont été négociés à la moitié de leur valeur, exactement comme on négocierait des actifs pourris ou toxiques sur le marché financier. Or les obligations du trésor ne sauraient être classés actifs toxiques. Le premier péché de Nkoto Emane aura été de faire valoir que la garantie de l’Etat ne vaut pas tripette. Il ne le croit cependant pas. Il a fait exprès de placer les titres avec une décote de 50 % pour mieux les céder à de petits copains. On comprend pourquoi aucune publicité n’aura été faite autour de ces titres auprès du public.
Deuxième crime pendable.Lorsqu’on soutient que les titres rachetés à Afrione l’ont été avec une décote de 30 %, le mensonge est tout ce qu’il y a d’ignoble. Les titres émis et achetés en 2006 avec une maturité de 10 ans ne font jamais leur valeur faciale la même année.Le crime a consisté à racheter à Franck Biya les titres dont il était porteur à un moment où ils ne valaient guère plus que leur valeur d’acquisition, c’est-à-dire 4,7 milliards de Fcfa.
Autrement dit, Dieudonné Evou Mekou aura indûment payé près de deux milliards en intérêts fictifs à Franck Biya. Combien d’autres porteurs de ces titres ont bénéficié de ces remboursements par anticipation aux mêmes conditions ?
D’où un troisième crime d’apprenti sorcier. L’on soutient que l’Etat du Cameroun est gagnant dans l’opération, parce qu’il aura économisé 5,6 milliards sur la valeur à maturité des titres en plus des intérêts. En finance, on ne verse pas d’intérêts sur de l’argent qu’on n’a pas reçu.
Combien Franck Biya a-t-il versé pour acquérir les titres en question ?
En attendant que la bande à Nkoto Emane daigne nous servir les preuves, même antidatées si elle y tient, les conclusions sont faites : le Cameroun vient de vivre une vaste opération d’escroquerie financière et intellectuelle sous la forme d’un délit d’initiés en bande organisée.
Le clan auquel nous devons une telle opération de magiciens est connu :
outre Nkoto Emane, l’oncle du village, on retrouve Louis-Paul Motaze à la manoeuvre, en attendant que le scandale annoncé des titres CNPS livre ses secrets, Alamine Ousmane Mey qui jouait le libéro en couverture pour Franck Biya avec des lettres ultra méticuleuses de garantie bancaire, Dieudonné Evou Mekou, le presque inamovible directeur général de la CAA, le gardien des titres qui sait à l’occasion garder la cage, et Polycarpe Abah Abah, le préposé aux marmites financières de la République.
La justice camerounaise appelle ça le détournement en coaction, un délit pour lequel d’illustres acteurs de la scène camerounaise sont en prison. Et pour beaucoup moins que six milliards et demi.
C’est Paul Biya qui va être pour le moins embarrassé avec son Opération Epervier.
© Les Nouvelles du Pays : Alex Bema

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